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HANS HAACKE / VIEWING MATTERS : UPSTAIRS,
DÉTAIL, 1996 /
MUSÉE BOIJMANS VAN BEUNINGEN, ROTTERDAM.
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CARTOGRAPHIE ÉLÉMENTAIRE
La collection est avant tout le résultat de l'acte de collecte.
Elle est outil de mémoire qui alimente l'utopie lacérée
de la résistance au temps, lui-même se donnant aujourd'hui
dans l'exponentielle consumériste. Elle est aussi l'ensemble
de témoignages d'individus sensibles à leur société.
En d'autres termes, il s'agit d'acquérir pour donner à
voir et, lorsque l'artiste est toujours en vie, lui apporter une
aide à la création. L'acquisition s'opère selon
différents paramètres: la création issue d'un
territoire et sa mise en relation outre frontière, la qualité
de l'uvre produite - définie selon les critères
du temps -, le pouvoir décisionnel émanant d'une commission
d'achat. Aussi, lors des Métamorphoses - un projet pluridisciplinaire
réalisé à l'occasion de Bruxelles/Brussel 2000,
Ville européenne de la Culture -, lorsque la section des
arts plastiques1 convoque le double principe "collection -
collecte", l'occasion a été donnée de
comparer les différentes vitesses de travail entre secteurs
privé, public et institutionnel2. Le projet, dans son intitulé,
Dérives et dispositifs autour de l'image - Le fait plastique,
sa gestion et ses déclinaisons dans la Ville de Bruxelles,
renvoyait de manière plurielle à l'idée de
collection, d'une part, et à sa mise en uvre initiale,
d'autre part. Les perspectives dégagées ont eu pour
effet la rencontre de différents protagonistes issus de ces
secteurs lors de rencontres informelles dont, pour le secteur privé,
la table ronde du 2 octobre 2000 à l'auditorium de Belgacom,
avec, comme participants: La Fondation Belgacom, le Service des
Arts de la BBL, Artesia Arts, et Archétype.
On ne peut cependant qu'être insatisfait du manque de relais
donné à cette mise en uvre sur le territoire
de la Communauté française. En effet, cette cartographie
élémentaire d'acteurs décisionnels, tous secteurs
confondus, offrait potentiellement, dans la concertation des domaines
spécifiques, la redéfinition de fonctions effectives,
aptes à outiller l'institution dans l'élaboration
de sa politique de collecte, et dans son enjeu de visibilité
sur la scène internationale.
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MARIE-JO LAFONTAINE / WIR HABEN DIE KUNST
DAMIT
WIR NICHT AN DER WAHRHEIT ZUGRUNDE GEHEN, 1991 /
INSTALLATION À LA GLYPTOTHÈQUE, MUNICH.
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INITIATIVES ET RECHERCHES DANS LA GESTION DE LA COLLECTION PUBLIQUE
Aujourd'hui la notion de collection s'interroge notamment via le
lieu même de son exposition: le Musée. Pour exemple,
notons l'ouvrage de James Putnam, Le Musée à l'uvre
- Le Musée comme médium dans l'Art contemporain3,
ou encore l'ouvrage publié par l'ULB, en 1999, résultat
du colloque international organisé par le Centre d'Etudes
canadiennes de l'ULB, Les musées en mouvement - Nouvelles
conceptions, nouveaux publics (Belgique - Canada).
Si certaines infrastructures muséales (par exemple le Musée
Boijmans van Beuningen - Rotterdam) font action d'audace pour rencontrer
la nécessité du discours artistique contemporain -
et dans l'ordre logique de la relation, pour exister dans la réception
aux publics -, il est navrant de constater, à l'échelon
institutionnel de notre pays, combien l'on demeure en deçà
des attentes des artistes issus du territoire, comme du public.
Aussi dans la problématique, qui dépasse de loin le
territoire de notre Communauté, pointons le numéro
17 de la revue bimestrielle française Mouvements: Les valeurs
de l'art - entre marché et institutions4, qui permet de mettre
en abîme la question de la collection, via les lieux de monstrations
et ses problématiques connexes: qu'il s'agisse du phénomène
de la friche comme outil potentiel du XXIe siècle apte à
gérer l'hybride alliance privée - publique, depuis
la nécessité d'exposition, d'aide à la création
et le phénomène de l'industrie culturelle en développement
constant.
En d'autres termes, questionner la collection revient (in)directement
à questionner le Musée. Comme le souligne James Putnam,
les interventions d'artistes se multiplient dans le lieu même
du Musée. Celles-ci sont souvent d'obédience politique
et critique car elles agissent au cur de la structure traditionnelle.
L'artiste intervient directement sur le contexte de muséification,
avec la volonté d'agir et donc de s'inscrire directement
dans l'enclos ceint par les murs de l'histoire. Plusieurs exemples
de pratique d'intervention contemporaine éclairent le lieu
symbolique: le dialogue entre art ancien, moderne et contemporain
s'entame. A titre d'intervention, citons l'intégration de
Marie-Jo Lafontaine dans la coupole de la Glyptothèque de
Munich, 1991. Parfois, le plasticien, appelé à orchestrer
les collections - Joseph Kosuth, The play of the unmentionable,
1990, Brooklyn Museum -, en devient le metteur en scène.
S'appuyant sur sa démarche par l'articulation de sa grammaire
formelle, le plasticien joue avec les méthodes muséologiques.
Dès lors, le Musée opte pour une sorte de lifting
"coup de folie" et se met à l'écoute des
problématiques contemporaines, tant dans l'exercice de l'exposition,
que dans le rôle critique qu'elle opère. Ici, le plasticien
devient acteur et protagoniste de l'enjeu de monstration.
Aussi, dans l'enjeu de cette mise en uvre contextuelle, l'intervention
du plasticien pose t-elle question. L'institution muséale
a tout intérêt à amener l'artiste, toujours
en recherche de reconnaissance narcissique, à réfléchir
et à proposer des solutions permettant l'actualisation de
ses réserves. Elle entretient un rapport de dépendance
tout en sublimant le soutien à la création. De ce
constat découle une remarque: l'institution est-elle à
ce point en manque de capacité créative pour qu'elle
ne puisse elle-même réfléchir de manière
prospective sur la genèse de ses propres acquis ?
Sans faire de généralisation abusive, on constatera
que le concept de manuvre, théorisé par les
Québécois Alain-Martin Richard et Richard Martel (voir
"l'art même" #8, p.12), est de plus en plus en vogue.
Pour rappel, la manuvre consiste à proposer un dispositif
d'exposition où des uvres, de chronologie et de genre
différents, sont présentées selon des axes
définis par le "metteur en scène". Les exemples
fournis aujourd'hui sont de plus en plus nombreux: l'accrochage
à la Tate Modern Gallery, le "nouvel" accrochage
de Beaubourg, l'exposition Voici de Thierry de Duve, la première
exposition de Pierre Olivier Rollin dans le cadre de la présentation
des nouvelles acquisitions de la Province de Hainaut, Musée
en uvre(s), ainsi que Parade, présentation de 100 ans
d'art en France dans les collections du centre Pompidou, à
Sao Paulo, sous le commissariat de Laurent Le Bon.
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JOSEPH KOSUTH / THE PLAY OF THE UNMENTIONABLE,
1990 /
INSTALLATION AU BROOKLYN MUSEUM, NEW YORK.
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La manuvre fait se côtoyer des uvres, selon la
grille de lecture établie en correspondance avec les propos
critique et formel d'un artiste, d'un théoricien, d'un critique,
ou d'une équipe curatoriale, qui revisitent les productions
passées ou récentes pour en proposer un amalgame.
Le dispositif d'exposition renouvelle et démultiplie les
lectures, crée des lieux de connivence, jusqu'alors peu ou
prou mis en évidence. Les uvres ont valeur d'appel
les unes par rapport aux autres dans l'optique du mixage.
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DAMIEN HIRST / DEAD ENDS DIED OUT, EXPLORED,
1993
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Ces manières de travailler la collection ont en commun l'action
de retisser l'Histoire, de pointer ce qui apparaît contemporain:
casser la linéarité de l'histoire, ou son côté
cyclique, pour rendre visible les lieux de connivence sous le biais
de "familles d'esprit". Ce qui est amusant, c'est que
l'on en vient presque à renouer avec l'idée de "cabinet
de curiosité" pourtant ancrée dans la pratique
de travail très XIXe.
Si certains plaident pour le constat affligeant d'une situation
proche du marasme dans la gestion de la collection, la réalité
n'est cependant pas si noire. En effet, les glissements de sens
appellent à la création de nouveaux outils de gestion
dans le phénomène dit de la "collecte",
ce qui aura pour effet à moyen terme, une redéfinition
des nécessités à satisfaire, des objectifs
à atteindre et des échecs à assumer, avec entre
autre postulat, la notion émergente de patrimoine artistique.
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